Inspiré des paysages de nos artistes passeurs Richard Séguin et Florent Vollant, notre directeur général et artistique Alan Côté vous offre ce conte hivernal, qui nous mène des confins des Appalaches jusqu’à l’immensité du Nitassinan.

Empruntant le grand sentier des montagnes bleues, au cœur des Appalaches, nous avons marché, marché pendant des jours. Les dernières feuilles tombées des arbres craquaient sous nos pas. Nous avons dormi à la belle étoile, pêché, chassé, cueilli nos rations quotidiennes, salué l’ours noir, amadoué le loup et admiré l’aigle royal.

Abreuvés des ruisseaux que nous croisions nous avons marché en état de grâce, enveloppés de la poésie ambiante, de la beauté des paysages et, au rythme dicté par la nature, nous avons pris le pas. Le pas du jour qui nous portait, nous entrainait à la traversée des montagnes, comme si nous l’avions fait depuis des millénaires. En surplomb de la vallée du St-Laurent, nous avons rencontré Mattempa, le vent de liberté, qui nous a suivi jusqu’à la côte. L’hiver était à nos portes.

À mesure que nous progressions vers le nord, des flocons ont commencé à tomber, puis un tapis de neige s’est rapidement installé sous nos pas. Les pistes d’animaux se multipliaient, écureuils, lièvres, perdrix, renards, lynx (à mettre tout au singulier ou tout au pluriel. Tu as déjà lièvres au pluriel) et puis des pistes que l’on n’avait jamais vu sur cette partie du territoire. Des pistes d’ours sur la neige, des pistes géantes…

Au détour du sentier nous l’avons reconnu, Nanuq, le grand ours blanc. Effrayé par sa présence, nous avons brouillé nos pistes et nous nous sommes réfugiés derrière un rocher pour l’observer. Mais que faisait-il là, à des milliers de lieues de son habitat? Comment avait-il pu rejoindre ces terres?

Majestueux, Nanuq avançait, menaçant. Notre stratagème avait fonctionné, puisqu’il poursuivi sa route sur les traces de nos pas. Quand nous fûmes assurés qu’il n’était plus dans les parages, nous avons suivi les siennes poursuivant notre chemin vers la côte.

À notre grande surprise, nous avons aperçu à l’abordage du rivage une sorte de pont, un pont de glace qui semblait traverser le grand fleuve, ce qui expliquait la présence de Nanuq de ce côté. Après nous être assuré de la solidité du pont, nous l’avons emprunté puis marché, marché pendant des heures pour finir par traverser le fleuve.

Tshi tshi, le grand barde innu, qui nous avait observé depuis un bout, s’est avancé pour nous accueillir. Après nous avoir souhaité la bienvenue sur Nitassinan, notre terre en langage innu,  il s’est adressé à nous solennellement puis, sourire en coin, il nous a dit :

C’est quoi l’idée de marcher sur la banquise… le bateau ça vous tentait pas ?

Après l’éclat de rire général, il nous a invité dans sa maison afin de partager un repas frugal composé de saumon sauvage, de crabe et de homard pêchés par la famille.

Puis au son des guitares et du teuehikan, nous avons chanté pour remercier la terre, la rivière et la mer sous la pleine lune de décembre.

C’est inspiré des paysages de nos artistes passeurs, Richard Séguin et Florent Vollant, que nous vous souhaitons de belles fêtes de fin d’année.