Voilà un peu plus de 7 ans que les flammes se sont emparées du Théâtre de la Vieille Forge. Après bien des péripéties et le début des travaux en 2023, la Longue-Pointe de Petite-Vallée pourra bientôt célébrer son nouvel édifice conçu par In situ, atelier d’architecture. Ce théâtre, qui joue sur les formes et les couleurs, a dû relever de nombreux défis posés par cette construction ambitieuse.

Dès le départ, les questions fusaient, comme nous le raconte Stéphane Pratte, qui a cofondé avec Annie Lebel In situ, Atelier d’architecture en 1995 : « Comment construire une grande institution dans une pointe qui s’avance dans la mer, qui est assez fragile à côté des petites maisons […] Comment s’intégrer dans cet environnement ? »

En raison de son emplacement géographique, le Théâtre de la Vieille Forge, fondé originellement en 1983 par Alan Côté dans la forge de son grand-père, est exposé aux vents d’ouest et aux intempéries, mais aussi à divers défis structurels ou encore scénographiques.

Après l’événement tragique qui a détruit le précédent théâtre, des enjeux techniques et mécaniques ont également été pris en compte pour protéger le nouvel édifice, désormais entièrement équipé de gicleurs. « La pression de la ville, d’eau de la ville n’est pas suffisante pour ça. Donc il a fallu faire un réservoir enfoui avec des pompes sur génératrices en cas de panne pour pouvoir alimenter le théâtre et les bâtiments giclés », raconte l’architecte.

Un théâtre inspiré de la Gaspésie

« L’intuition qu’on avait, c’était de scinder un peu le programme en deux volumes, un qui est la salle de spectacle et l’autre qui est vraiment les espaces d’accueil, les loges d’administration, tout ça », explique Stéphane Pratte.

Pour ce nouveau théâtre, In situ a voulu reprendre les archétypes de l’architecture gaspésienne avec des matériaux similaires. « C’était volontaire aussi dans le sens où c’est plus facile en région d’avoir accès à ces corps de métier là comme le bois ». Selon lui, la spécificité qui fait que le projet de théâtre est un peu particulier, c’est parce que ce sont des corps de métiers presque résidentiels. « Il n’y a pas de mur rideau, il y a des fenêtres, on utilise des bardeaux de cèdre, de la toiture métallique », détaille-t-il.

Tout a été pensé pour la construction du nouveau Théâtre de la Vieille Forge, y compris les couleurs des deux bâtiments qui relèvent d’enjeux esthétiques, mais aussi d’enjeux économiques.

« Le gris argenté, c’est le vieillissement naturel du cèdre. Donc pour tout ce qui était du côté sud avec le soleil et pour le plus gros des deux volumes, étant donné que ça n’a pas d’entretien, d’emblée c’était important d’utiliser ce matériau-là.» 

De l’autre côté, l’architecte explique le choix du rouge, plus précisément de la couleur sang de bœuf comme un clin d’œil à cette teinte iconique qu’on retrouve sur les granges de la Gaspésie.

Plus qu’un théâtre

Ce dernier explique aussi que les petits chalets seront aussi remis au goût du jour avec les mêmes couleurs. 

« En fait, c’est de traiter ça comme le site de la Vieille-Forge, ce n’est pas seulement un théâtre, c’est tout un environnement […] Il va y avoir des événements, il va y avoir le restaurant, il y a le bistrot de la Vieille-Forge, tout ça, on avait en tête de créer vraiment un site plutôt que juste un bâtiment », souligne-t-il.

L’architecte poursuit en expliquant que tout au long du bâtiment rouge se trouve une grande galerie qui correspond aussi à l’accès à la mer. « Il y a des rampes qui vont descendre aux terrasses. Puis après ça, c’est la grève. Cette relation à la mer pour nous était importante. »

Au niveau de l’intérieur du théâtre, Stéphane Pratte souligne son caractère multifonctionnel par le développement d’un système permettant à la salle de s’ouvrir complètement. « Ça peut devenir un grand resto, ça peut devenir un cabaret, ça peut devenir une salle de réception de mariage. », donne-t-il comme exemple.

« On l’a vraiment créé comme une infrastructure, un outil qui est très malléable. Il n’y en aura pas dix théâtres comme ça dans la région ». Pour In situ, penser la salle de cette manière était important afin de répondre à des besoins qui ne sont pas encore envisagés. 

« C’est vraiment très agréable de faire ce projet-là avec les gens qui sont impliqués au niveau de la construction. Ça se passe très, très bien avec l’entrepreneur. Les gens sont vraiment fiers de travailler sur le théâtre. Donc, pour nous, c’est quand même du bonbon », conclut-il.